Les viandes bio présentent-elles des avantages côté acides gras ?
Oui, une tendance se dégage qui montre des teneurs plus faibles en lipides totaux dans les viandes de cochon, bœuf et volailles bio que dans les viandes classiques. Les viandes bio sont donc moins grasses. En outre, elles renferment plus d’acides gras polyinsaturés, si précieux pour notre santé.
Et le lait ?
Fait rare, toutes les études effectuées dans différents pays convergent vers le même résultat : le lait bio comporte, en moyenne, 70 % de plus d’oméga 3 qui sont particulièrement nécessaires aux jeunes enfants et aux personnes âgées. En outre, le rapport entre les oméga 6 et les oméga 3, généralement fortement déséquilibré au profit des 1ers (1) est, ici, plus intéressant. L’explication se trouve dans l’alimentation des animaux qui est, selon les chercheur, le facteur essentiel. Pour contenir beaucoup d’oméga 3, il faut donner de l’herbe fraîche multi-espèces aux vaches – ce n’est pas une découverte vous allez me dire ! mais cela a le mérite d’être démontré –, ensuite du foin sec, et peu de concentrés. Un menu que l’on trouve dans les fermes bio qui misent avant tout sur le pâturage et limitent l’achat de nourriture à l’extérieur.
Enfin, une étude a été consacrée à la vitamine E, la principale vitamine antioxydante qui protège les lipides de l’oxydation. On a presque toujours plus de vitamine E dans le lait bio que dans le lait classique.
En élevage, les pratiques bio ont-elles d’autres impacts ?
On parle beaucoup d’antibiorésistance dans les troupeaux. Si on utilise de façon chronique des antibiotiques sur des vaches, des moutons, des poulets, les bactéries pathogènes que l’on souhaite détruire peuvent s’y habituer et devenir résistantes. L’antibiotique n’a alors plus aucun effet sur la maladie. L’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a conclu qu’il y avait moins de bactéries résistantes aux antibiotiques dans les élevages bio que dans les autres élevages. Ce qui est assez normal puisque, en gros, en bio, les antibiotiques sont interdits sauf traitement exceptionnel pour sauver les animaux (2). Et il est interdit d’employer ces médicaments à titre préventif alors qu’en conventionnel, si un animal est malade, par précaution, l’ensemble du cheptel est traité.
(1) La part des oméga 6 ne doit pas dépasser plus de 5 fois celle des oméga 3, un équilibre rarement atteint.
(2) Les antibiotiques sont strictement limités dans les élevages bio à 1 traitement par an (pour les animaux qui vivent moins d’un an) et à 2 par an (pour ceux dont la durée de vie dépasse 1 an).
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Directeur de recherche à l’Inserm, Denis Lairon est biochimiste et nutritionniste. Il a notamment coordonné une vaste étude sur l’alimentation bio publiée par l’Afssa (1) en 2003 et rassemblant près de 50 experts pendant 2,5 ans. Depuis, cette étude a été étayée par d’autres travaux d’importance, notamment le rapport de la FSA (Royaume Uni) de 2009 (aujourd’hui réhabilité).
L’interview est extraite de son intervention au colloque Bioconvivium, organisé en octobre 2012 à Valence, dans la Drôme, et portant sur “La qualité nutritionnelle et sanitaire des aliments bio”.
(1) Aujourd’hui remplacée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.